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RÉSEAU sur la Borréliose de Lyme en France, ses Co-Infections et les Maladies vectorielles à Tiques Construction collaborative d'une information critique contre le déni

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Comment une bactérie peut-elle diviser le monde scientifique? (II. "Business")

Dans la partie I, nous avons évoqué la façon dont avait débuté la grande imposture concernant la « maladie de Lyme » et comment quelques scientifiques de l’Université de Yale avec appui du CDC ont pu en définir à jamais les critères diagnostiques. Ce nouveau chapitre de l’histoire tentera de faire comprendre la naissance des conflits d’intérêts. Il sera suivi d’autres parties tout aussi étonnantes.

Partie II : Un mensonge, suffisamment proféré, deviendrait-il vérité ?

Microscope by Mark192 (Travail personnel) [CC-BY-SA-2.5 (www.creativecommons.org/licenses/by-sa/2.5)], via Wikimedia CommonsPlus de 76 millions de dollars US seraient revenus aux auteurs des Guidelines IDSA, aux fins de recherches étatiques sur la borréliose[1].
Qu’elle est donc l’utilité de ces recherches intensives dès lors que cette infection est guérissable dans tous les cas avec un traitement de quatre semaines, comme le martèlent, sans se fatiguer les auteurs de ces mêmes Guidelines ?
Depuis la re-découverte de la bactérie en 1982 par Burgdorfer, deux choses ont énormément pris de l’ampleur : le nombre croissant de malades (chroniques) et la guerre exaspérante à tous les niveaux et sous tous les aspects de l’infection.

1 - 1995 : Première victime officielle de la chasse aux sorcières

(L’Etat de New-York contre le Dr John Bleiweiss)
Le Dr Bleiweiss est certainement la première victime de "l’inquisition". Atteint lui-même de borréliose, il se consacre désormais au diagnostic et à la thérapie de cette infection. Il soigne plus de 2 000 patients. Toujours et encore, il constate que le standard thérapeutique de l’IDSA et du CDC (Centers for Disease Control and prevention, Dearborn) est inefficace et que ses patients ne sont pas guéris par ce schéma thérapeutique.
Au lieu donc d’administrer des traitements sans succès, il fait ce que bon nombre de bons médecins, confrontés à ce dilemme, font : il fait des essais thérapeutiques avec différents antibiotiques et dans des cas isolés, il prolonge la durée du traitement et combine différents antibiotiques accompagnés par des probiotiques, vitamines, conseils de nutrition, etc.
Il choisit chaque thérapie adaptée à chaque patient individuellement en fonction de ses connaissances et de sa pratique. N’est-ce pas ce que ferait tout médecin, a fortiori si la santé de son patient s’avérait profondément atteinte?
Sept années durant, il sera soumis à des attaques et poussé au bord de la ruine.
Au mois d’août 1995, le Medical Bord de New-York le menace de lui retirer sa patente de médecin : Sept de ses patients ne présenteraient pas de sérologie positive à "Borrelia burgorferi". Le 12 août 1995 le journal Trenton Times publie qu’une enquête est en cours contre lui. Le lendemain, le Dr Bleiweiss met fin à ses jours par arme à feu.

2 – Vaccins et Big Business

L’argent d’abord

Cinq mois avant la conférence de Dearborn[2] (toujours elle!) en 1994 (année très prolifique en échanges et réunions), des responsables du laboratoire SKB (SmithKline Beecham)[3], du CDC et de la FDA (Food and Drug Administration)[4] se sont réunis afin de se mettre d’accord sur les exigences de la définition de cas de la maladie de Lyme. La LDA (Lyme Disease Association) cite un médecin du laboratoire SKB , qui affirme que cette réunion était effectivement centrée sur la définition de cas de la Maladie de Lyme, qui à ce moment (5 mois avant Dearborn), n’était pas suffisante pour une étude clinique.
Cependant qu’en octobre 1994 les critères de Dearborn sont débattus, le laboratoire SKB, avec l’accord de la FDA et du CDC, a déjà pu utiliser le diagnostic standard établi par cette même conférence... aux fins d’études cliniques. On croit rêver !
En 1994 encore, la phase II des études avait seulement débuté. Début 1995, l’on commença seulement la phase III, phase décisive : la phase d’incidence dont les résultats ne seront connus qu’en fin 1995.

Chercheurs, brevets et marchés...

Revenons quelque peu en arrière. En Allemagne durant l’année 1988, trois scientifiques, Markus Simon, Rainer Wallich et Michael Kramer travaillent à Freiburg et Heidelberg à l’élaboration d’un vaccin pour borréliose humaine. Vaccin devant ultérieurement être fabriqué et commercialisé aux Etats-Unis. Plusieurs équipes cependant travaillent sur cette recherche; les trois allemands seront manifestement les plus rapides. En 1989, ils découvrent la protéine OspA qui – comme ils le constatent - stimule considérablement la production d’anticorps chez leurs souris infectées à Borrelia burgdorferi. La même année, cette équipe déposera son premier brevet sur cette découverte: N° de brevet : EP643974B.
L’industrie pharmaceutique allemande n’est pas intéressée. Le groupe pharmaceutique anglais SmithKline Beecham (SKB) quant à lui, l’est d’autant plus. Il rachète au trio de chercheurs l’option sur le brevet pour quelques centaines de millions de marks. Une coopération de six années débute. Parallèlement, ce laboratoire envisage également la production d’un vaccin spécifique à l’Europe. Le vaccin devant être élaboré à partir de cette découverte concernant l’OspA, protéine extrêmement variable d’une espèce à l’autre, mais également d’une souche à l’autre , pose cependant problème. Il est bel et bien sensé  protéger  contre l’infection ultérieure par une souche de B. burgdorferi sensu stricto dont la protéine OspA est très proche de celle de la souche utilisée pour le vaccin, mais pas contre B. garinii, ou B. afzelii (découvertes en Europe).  Il serait donc efficace aux Etats Unis où la seule espèce pathogène est B. burgdorferi sensu stricto. Il fut donc décidé de débuter par le marché américain.

3- La course des laboratoires

1996: Aux Etats-Unis, une manne incommensurable de dollars s’est abattue sur les laboratoires dès la mise en route de « tests sérologiques fiables » et dès la décision prise de produire un vaccin.
Vaccin et Borrelia: toute une histoireImmédiatement après la conférence décisive de Deaborn, les deux firmes pharmaceutiques Smithkline Beecham (SKB) à Philadelphie et Pasteur Mérieux Connaught (PMC) basé en Pennsylvanie[5] ont décidé de poursuivre la mise au point d’un vaccin qu’elles pensent commercialiser très tôt.
La société SKB semble nettement plus pressée. Leurs études ne sont pas encore - et de loin - terminées, ne sont pas encore évaluées, ni validées par les experts ; cela ne dérange nullement la SKB de proposer son vaccin aux 15 000 patients qui, jusqu’à présent, ne recevaient que du placebo. Les motifs d’offre faite par le groupe d’investissement, expliquera plus tard lors d’une audition le laboratoire SKB, se portaient sur la remise du "vaccin". Certains jugeront cette approche extrêmement audacieuse.
Par cette observation, le laboratoire reconnaît par conséquent, que la remise du vaccin a été effectuée afin de toucher « l’enveloppe », au mépris de sa fiabilité puisque non encore expérimenté par les études. En somme, « le temps, c’est de l’argent ! ».
Les premières injections du vaccin sur des volontaires et aux fins d’étude ont débuté entre le 1er mars et le 30 avril 1994. La seconde injection a été faite environ 1 mois plus tard entre avril et le 30 mai 1994, donc bien avant la Conférence de Dearborn (27-28 novembre 1994) !
Pourtant, rien n’est simple. Le caméléon Borrelia burgdorferi, qui en permanence peut modifier sa surface et sa forme, reste encore à ce jour, un très mauvais candidat pour un vaccin. (cf. encadré)
Malgré toutes ces incertitudes, le vaccin se base donc sur la protéine OspA.

4-La mise sur le marché

Les critères de Steere et le marché

De quelle façon un produit peut-il donc passer au travers d’une autorisation aussi compliquée et restrictive de mise sur le marché par la FDA ( Food and Drug Administration), agence fédérale américaine des produits et médicaments ?

C’est là qu’interviennent les nouveaux critères définis par Steere à la conférence de Dearborn, qui arrangent considérablement les deux laboratoires travaillant à l’époque sur le vaccin et ceci pour deux raisons :
a) Critères de définition de cas de la « maladie de Lyme » :

  • symptômes cliniques avec Erythème Migrant validés par un médecin;
  • arthrite « auto-immune » localisée dans un seul genou de préférence.

b) Critères de diagnostic :

  • Elisa [6], qui est basé sur la reconnaissance de plusieurs antigènes spécifiques à Borrelia burgdorferi, positif entre le deuxième et le sixième mois du début de l’infection;
  • Western-Blot (synonyme d’immuno-empreinte et de Immunoblot) est plus spécifique, elle permet d’obtenir des résultats diversifiés (taille et nombre des fragments révélés par les anticorps), elle est surtout utilisée pour confirmer le test ELISA positif.[7]

Sans définition très stricte de cas, Steere et le CDC n’auraient certainement jamais pu faire passer leurs études à travers les exigences de l’administration de la FDA.
Si cette même définition de cas avait été plus « élargie » (s’entend à la Borréliose persistante, c’est à dire pas d’érythème migrant, avec évidemment plus de 6 mois d’infection, et une sérologie Elisa négative, bien sûr non suivi d’un WB), les examinateurs du FDA, n’auraient pas pu statuer sur qui était définitivement atteint de Borréliose ou non. A tout moment, leurs données dans ce cas auraient pu être contestées par des Western Blot positifs, malgré absence d’arthrite et Elisa négatif.
En supplément, avec l’élimination dans le diagnostic sérologique des protéines OspA et OspB (pratiquement absentes en stade précoce de l’infection, mais plus présentes en cas de Borréliose chronique), il était parié d’avance que les générations du premier et second vaccin à venir, justement basés sur la protéine OspA puis OspB, ne produiraient que des résultats sérologiques négatifs !

Maladie de Lyme et conflits d’intérêts !

En mai 1998, se situe l’audience préliminaire d’approbation du vaccin "Lymerix" de la société SKB par la FDA.
Il semblerait qu’à cette époque, cette administration possédait une curieuse façon de concevoir ce que sont des conflits d’intérêts. Le directeur des études sur le vaccin du laboratoire SKB, rémunéré par le même laboratoire SKB, appartient en même temps à l’équipe des experts de la FDA qui doit prendre la décision concernant son autorisation de mise sur la marché. Il se nomme : Allen C. Steere.
En juin 98, le directeur de recherche de Pasteur Merieux Connaught, le Dr Leonard Sigal, stoppe quant à lui la recherche sur leur vaccin "Imulyme" juste avant l’autorisation de mise sur le marché. Selon son avis, trop d’effets secondaires risquent de se présenter[8]. "Imulyme" ne sera jamais commercialisé.
Cela ne dérange nullement M. Steere et le 21 décembre 1998, l’autorisation de mise sur le marché de "Lymerix" est accordée (la seule différence avec "ImuLyme" étant l’absence de l’adjuvant : l’hydroxyde d’aluminium).
Les vaccinations « définitives « commencèrent donc en janvier 1999.
Des chapitres entiers pourraient être écrits sur cette facette «vaccin»; concernant déjà l’établissement scientifique de celui-ci; l’enveloppe de plus 500 millions de dollars, manne distribuée aux uns et refusée à d’autres n’entrant pas dans la « démarche Steere »; les conflits d’intérêts de plusieurs membres de l’équipe « Yale » et plus...

En juin 2000, la première plainte d’un patient contre le laboratoire SKB fut déposée[9].
En février 2002, la société SmithKline Beecham devenue entre temps « Glaxo SmithKline » retire son vaccin du marché prétextant un déficit commercial par rapport aux estimations.[10].
Entre décembre 1998 et juillet 2000, plus de 1,4 millions de doses ont été distribuées.  905 effets secondaires ont été signalés durant cette période dont 7,4 % qualifiés de sévères (potentiellement mortels, nécessitant une hospitalisation ou une intervention, ou suivi d’une  incapacité permanente ou même de décès). 56 % de ces effets sont apparus juste après l’injection de la première dose.[11]



Nota : la majeure partie des renseignements de cet article provient du livre de Birgit Jürschik-Busbach : ++Die verschwiegene Epidemie++ avec son aimable accord ainsi que du document : Lyme Disease Association : Conflits of Interest in Lyme Disease 2001.

Notes

[1] Source : « Die verschwiegene Epidemie“ de Birgit Jürschik-Busbach.

[2] 2ème Conférence nationale sur la borréliose de Lyme (27-28 novembre 1994) où furent définis et validés les «critères standards » symptomatologiques et diagnostics de la pathologie.

[3] SmithKline Beecham, entreprise pharmaceutique britannique basée à Philadelphie

[4] Agence Fédérale des Produits et Médicaments qui possède entre autre le mandat d’autoriser la commercialisation des médicaments sur tout le territoire US.

[5] Avec le rachat du groupe canadien Connaught Laboratories, en 1989, l’entreprise est renommée Pasteur Mérieux Connaught en 1996.

[6] Elisa ou Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay

[7] Algorithme du diagnostic sérologique de la maladie de Lyme. (Center for Disease Control CDC Atlanta, 1997). Dépistage : IFI ou ELISA. Confirmation en Western Blot si résultat + ou douteux. (IgG et/ou IgM spécifiques). Sérologie considérée comme + : -Présence d’AC type IgG contre au moins 5 des 10 protéines : 18-21-28-30-39-41-45-58-66-93 kDa; -et/ou présence d’AC type IgM contre au moins 2 des 3 protéines : 24-39-41 kDa. IgM : recherche en WB : utile dans les phases I, symptomatologie atypique (ex : absence d’ECM, 5-20% des cas).  utile dans les formes tardives.

[8] "ImuLyme" de Pasteur Mérieux Connaught  a été rigoureusement testé par le Dr Leonard Sigal, directeur du Centre de la maladie de Lyme à l’Université de médecine et de dentisterie du New Jersey-Robert Wood Johnson Medical School, dans une étude de trois ans. "ImuLyme" diffère de LYMErix en ce qu’il ne se compose pas d’alun en tant qu’adjuvant, considéré par beaucoup dans la communauté médicale comme un avantage possible. Les motifs « officiels » invoqués pour ne pas poursuivre la délivrance de permis de ImuLyme ont été les questions techniques dans les essais cliniques de phase III, les questions des redevances concernant les brevets avec GSK et une évaluation du marché potentiel pour le vaccin contre la maladie de Lyme.

[9] Avant que le vaccin n’ait été approuvé, au moins quatre plaintes ont été déposées par des personnes qui avaient participé à des essais de vaccins - très inhabituel puisque les participants signent un consentement éclairé. Trois ont été déposées contre Connaught, l’autre a été déposée contre SmithKline.

[10] Thèses officielles NCBI NIH

[11] Source : Soutenances Université Bordeaux 2

ELS /ReBL

Rédacteur: ELS /ReBL

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