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RÉSEAU sur la Borréliose de Lyme en France, ses Co-Infections et les Maladies vectorielles à Tiques Construction collaborative d'une information critique contre le déni

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LES DOUZE années de déni scientifique de l’IDSA !

À quoi joue t-on lorsqu’on s’amuse avec la santé de milliers de malades ?
De quel droit induit-on des médecins en erreur ?
À plusieurs reprises dans la controverse IDSA/ILADS sont apparus en cette année 2012 les noms de Klempner et d’Embers, de même que la référence à des études anciennes sur les singes rhésus. Une partie importante du problème du déni se joue là. Explications.

En 1996 débutait une étude dite "Klempner", du nom du scientifique qui en était responsable. Elle devait se poursuivre pendant 4 ans. Elle sera publiée le 12 juin 2001 [1]. C’est cette étude qui reste jusqu’à ce jour l’axe central des "Guidelines" de l’IDSA et de leurs fervents adeptes, en servant de base et preuve pour les recommandations sur la maladie de Lyme, son traitement, et le refus d’en voir la persistance. [2]
En 1998, une étude, dite « d’accompagnement »,  servant "d’étude de contrôle" à la précédente, est réalisée sur les macaques rhésus [3] par une autre équipe, dirigée par Embers  (1998-1999). Elle démontre la résistante de la bactérie Borrelia burgdorferi aux antibiotiques... confirmant une chronicité de la borréliose même après traitement.
Ces deux études furent commanditées par le NIH et coordonnées par le Dr. Phil Baker, aujourd’hui à la retraite.
fish timeline revised cropped ©2012 lbJohnsonOr, la parution des Guidelines de l’IDSA sur la maladie de Lyme a lieu en 2006. S’appuyant étrangement sur l’unique étude Klempers, elle ne tient pas compte de l’étude Embers... ou plutôt de façon détournée.[4]
En conséquence, le Consensus français sur le diagnostic et le traitement de la Borréliose de Lyme, du 13 décembre 2006, copie de l’IDSA, n’en tient pas plus compte...

Ce n’est qu’en 2012 que cette étude, qui bat en brèche les positions jusqu’alors inflexibles de l’IDSA, est publiée dans son intégralité et sort enfin de l’ombre. [5]

Ainsi douze années se sont écoulées entre la publication de l’étude Klempner, celle-là même tant citée en référence par les auteurs des Guidelines de l’IDSA et consorts, et celle de l’étude Embers qui l’accompagnait. Douze années durant lesquelles on a affirmé aux patients que la maladie ne pouvait en aucun cas devenir chronique et que la borréliose persistante n’existait pas. Douze années durant lesquelles de nombreux médecins ont dû faire face à beaucoup de difficultés administratives dès lors qu’ils avaient diagnostiqué et traité leurs patients pour une infection persistante !
Les tenants et aboutissants de ce retard ahurissant ne sont pas clairs: silence maintenu par le responsable au NIH de l’étude Embers et levé après son départ en retraite ? Manœuvres ou pressions politiques ? Impossibilité de dévoiler une note contradictoire à l’importante étude Klempner, surtout après 2006 ? Selon Lorraine Johnson directrice générale de l’association américaine LymeDisease, qui a mis en ligne un important dossier sur le sujet dont est issue, avec son accord gracieux, l’illustration explicite de notre article, cette publication aujourd’hui prouverait le courage des auteurs. [6] Peut-être aussi doit-on percevoir un changement "d’ambiance" dans le milieu médical international, de plus en plus défavorable à l’IDSA...
Nous donnons le court résumé de l’équipe Embers, extrait du Journal d’information scientifique en ligne PLOS ONE.

ABSTRACT: The persistence of symptoms in Lyme disease patients following antibiotic therapy, and their causes, continue to be a matter of intense controversy. The studies presented here explore antibiotic efficacy using nonhuman primates. ./.
Résumé : « La persistance des symptômes chez les patients atteints de la maladie de Lyme suite à un traitement antibiotique et leurs causes, continuent d’être un sujet de controverse intense. Les études présentées ici explorent l’efficacité antibiotique sur des primates non humains. Les macaques rhésus ont été infectés avec "B. Burgdorferi" et une partie d’entre eux a bénéficié de 4 à 6 mois de traitement antibiotique agressif par la suite. Plusieurs méthodes ont été utilisées pour la détection d’organismes résiduels, y compris l’alimentation des tiques élevées en laboratoire sur les singes (positif), immunofluorescence, la culture et la PCR. Les réponses anticorps pour le peptide diagnostique spécifique de "B. C6 Burgdorferi" ont été mesurées longitudinalement et diminués chez tous les animaux traités. L’antigène "B. Burgdorferi", l’ADN et l’ARN ont été détectés dans les tissus des animaux traités. Enfin, un petit nombre de spirochètes intacts a été récupéré par xénodiagnostic sur les singes traités. Ces résultats démontrent que "B. Burgdorferi" peut résister à un traitement antibiotique, administré post-dissémination, dans un hôte primate. Bien que "B. Burgdorferi" ne semble pas posséder de mécanisme de résistance et est sensible aux standards antibiotiques (doxycycline, ceftriaxone) in vitro, elle apparaît devenir plus tolérante post-dissémination dans l’hôte primate (in vivo). Ce constat soulève d’importantes questions concernant la pathogénicité des maladies chroniques résistant aux antibiotiques et leur pouvoir de contribution au traitement des symptômes. »

Quelques temps après le dévoilement au grand jour de cette étude sur les macaques, l’IDSA ne peut en rester là et, dès juillet, en critique les conclusions et réitère ses propres recommandations: Critical Analysis of Treatment Trials of Rhesus Macaques Infected with Borrelia burgdorferi Reveals Important Flaws in Experimental Design [7]

ABSTRACT : A critical analysis of two treatment trials of Chinese rhesus macaques infected with Borrelia burgdorferi ../.
Résumé : « Une analyse critique des deux essais de traitement sur des macaques rhésus chinois infectés par "Borrelia burgdorferi" indique qu’une attention insuffisante a été portée sur la documentation des taux sanguins, pharmaco-cinétique et paramètres pharmaco-dynamiques des antibiotiques utilisés dans cet hôte. Par conséquent, il est impossible de conclure que les résultats ont une validité pour juger de l’efficacité de la doxycycline ou ceftriaxone pour le traitement de Borrelia burgdorferi dans ce modèle animal. »

À noter cependant que d’une part l’acception "Maladie de Lyme" en Amérique du Nord ne concerne que l’infection de la B. burgdorferi, et que d’autre part l’étude Embers ne porte que sur cette Borrelia. À noter aussi qu’il faut alléguer d’un grand nombre d’études et d’expertises scientifiques pour obtenir gain de cause.
On peut néanmoins considérer que les raisonnements de l’IDSA semblent devoir bel et bien commencer à s’effondrer avec cette publication, et qu’en chaîne, des travaux anciens devraient être reconsidérés et de nouvelles études arriver à s’imposer. 

Notes

[1] National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) contract to Mark S. Klempner, M.D., of Boston University School of Medicine: NIH News Release.

[2] L’ILADS note en avril 2003 (in Evaluation of Antibiotic Treatment in Patients with Persistent Symptoms of Lyme Disease) : The recent article by Klempner et al. amplified the dispute between widely differing medical factions and prompted the current analysis. cf. ILADS. Lire les articles du RBLF sur les Guidelines de l’IDSA.

[3] Pour comprendre l’intérêt du modèle primate non humain en recherche biomédicale et l’utilisation privilégiée du singe Macaque rhésus, Macaca mulatta, dans l’expérimentation médicale, lire le paragraphe du Larousse encyclopédique sur "les macaques et la recherche médicale". On se réfèrera également au document de synthèse du Pr Desfontis, Ecole vétérinaire de Nantes, Unité de physiopathologie animale et Pharmacologie fonctionnelle : Modèles animaux en expérimentation. Pour approfondir le sujet, se reporter au site de l’Union européenne sur la Santé publique: "Primates non humains dans la recherche et l’expérimentation (fr)

[4] Du détournement de l’étude de contrôle Embers, nous parlerons dans un prochain article.

[5] Embers ME, Barthold SW, Borda JT, Bowers L, Doyle L, Hodzic E, et al., Persistence of Borrelia burgdorferi in Rhesus Macaques following Antibiotic Treatment of Disseminated Infection. PLoS ONE. 2012;7(1):e29914. (+ correction des mêmes, avril 2012.

[6] Nous renvoyons au blog de Lorraine Johnson: Lyme Policy Wonk et notamment à son article ’’Was this important Lyme study hidden for 12 years?’’ et à la discussion en commentaires. Illustration de notre article By Courtesy of Lorraine Johnson, LymeDisease-LymePolicyWonk ©2012 lbjohnson

[7] Gary P. Wormser, Phillip J. Baker, Susan O’Connell, Andrew R. Pachner, Ira Schwartz, and Eugene D. Shapiro. Vector-Borne and Zoonotic Diseases. July 2012, 12(7): 535-538. doi:10.1089/vbz.2012.1012 : Critical Analysis of Treatment Trials of Rhesus Macaques Infected with Borrelia burgdorferi Reveals Important Flaws in Experimental Design. En ligne sur Liebert Publications

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Rédacteur: ELS /ReBL

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