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Lyme: des moyens existent pour se protéger des tiques

Lyme: des moyens existent pour se protéger des tiques

Muriel Vayssier-Taussat, INRA

Le moyen le plus efficace pour ne pas se faire piquer par les tiques, susceptibles de provoquer la maladie de Lyme, est d’éviter leur contact. De ce fait, il est recommandé de limiter les promenades dans les herbes hautes, les bois, les jardins – en particulier s’ils sont proches de la nature et visités par des animaux sauvages, les pâtures des animaux d’élevage. Et ce, spécialement durant les saisons où l’activité des tiques est maximale, l’automne et le printemps – on peut toutefois rencontrer des tiques en hiver et en été, hors des périodes de températures extrêmes.

Pour enlever une tique fixée sur la peau, il est recommandé d'utiliser un tire-tique, vendu en pharmacie. Otom/Wikimedia, CC BY-SA, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=6647041
Otom/Wikimedia - CC BY-SA

Avec l’arrivée de l’automne, de la cueillette des champignons, et à l’occasion de la séance de l’Académie de Médecine dédiée à la maladie de Lyme, le 20 septembre, je me propose de passer en revue dans cet article les moyens de prévention qui ont fait leurs preuves.

La densité des tiques varie en effet selon le type de végétation, le taux d’humidité dans l’air, les cycles saisonniers et la diversité de leurs hôtes que sont les oiseaux, les mammifères ou les reptiles. Lorsque les conditions climatiques ne sont pas favorables, les tiques entrent en « diapause », un état caractérisé par une chute du métabolisme et un développement retardé. Celles de l’espèce Ixodes ricinus, les plus répandues en Europe, sont actives entre 7 et 25 °C, alors qu’elles sont quasiment inactives à des températures inférieures, ou encore lorsque la chaleur est intense et que l’hygrométrie est basse. En France, leur période d’activité s’étend de mai à octobre, avec un ralentissement en juillet et en août. Elles sont présentes sur tout le territoire à l’exception du proche pourtour méditerranéen (Ixodes ricinus est en effet détectée à l’intérieur des terres dans l’Hérault et le Var).

À l’affût au sommet d’une brindille

Les tiques passent plus de 90 % de leur temps en liberté dans la nature. Elles ont développé un système de détection sensible à des stimuli divers indiquant la présence d’un hôte tels que les gaz produits par les ruminants, les vibrations de l’air, la variation de température associée à la présence d’un animal à sang chaud – ou d’un être humain. Après avoir décelé l’existence d’un hôte potentiel, elles se postent à l’affût au sommet d’une brindille. Lors du passage de l’hôte, elles s’attachent à ce dernier afin d’effectuer leur repas sanguin.

Une fois sur l’hôte, la tique se déplace afin de trouver une zone fortement vascularisée, puis s’ancre solidement à l’aide de son hypostome, sorte de harpon. Lorsque la tique se prépare à insérer l’hypostome dans la peau de l’hôte, un flux de salive est produit. Du cément entre dans la plaie. Il durcit très rapidement et permet aux pièces buccales de la tique d’être fermement fixées à la peau. Afin d’éviter toute réaction de défense de l’hôte, la tique a développé des mécanismes d’adaptation lui permettant de dissimuler sa présence. Elle se fixe généralement dans un endroit discret et de façon indolore. Ses chélicères (des appendices terminés par des dents) sont capables de couper l’épiderme sans douleur, sa salive peut digérer progressivement les tissus de l’hôte et ouvrir graduellement la voie à la pénétration de l’hypostome dans la peau, sans éveiller l’attention.

Pour les personnes qui ne peuvent éviter les lieux propices aux tiques, il est recommandé de porter des vêtements couvrants, éventuellement imprégnés de répulsifs, et de s’inspecter après chaque sortie en forêt ou dans les pâtures, en particulier dans les régions fortement infestées. Si une tique est retrouvée non fixée à la peau, il n’y a aucun risque de transmission d’agents pathogènes et donc de développer la maladie de Lyme ou d’autres infections. Si la tique est retrouvée fixée, il faut l’enlever avec un tire-tique (sorte de pied de biche miniature vendu en pharmacie), puis désinfecter le site de piqûre. On doit tourner patiemment la tique dans un sens et dans l’autre, comme pour la dévisser, jusqu’à ce qu’elle se détache toute seule – en évitant de l’arracher.

Il faut ensuite surveiller l’apparition d’un érythème migrant, une large tache rouge centrée sur le point de morsure qui se déplace au fil des jours et finit par disparaître, ou de symptômes semblables à ceux de la grippe. Si de tels symptômes apparaissent, il est recommandé de consulter son généraliste. Toutefois, toutes les piqûres de tiques ne sont pas à l’origine de maladies – seulement 1 % des piqûres par des tiques infectées entraînent une infection.

Plus la tique est enlevée tôt après le début de la piqûre, moins le risque de transmission d’agents pathogènes est élevé. Une fois retirée, la tique peut être jetée. Toutefois nous recommandons de conserver le spécimen au réfrigérateur à 4° dans un pilulier, ou au congélateur. Ainsi, il pourra faire l’objet d’une identification ultérieure.

Apprendre à recueillir les tiques

Dans l’idée d’un partage des savoirs, l’INRA prépare actuellement un projet de science participative baptisé Citicks. Ce projet, qui a déjà son compte Twitter, a pour objectif de proposer des stages scientifiques pour un large public : chercheurs, patients, naturalistes, chasseurs, randonneurs et forestiers. Ces formations permettront d’apprendre à se familiariser avec la démarche scientifique, à recueillir et reconnaître les différentes espèces de tiques, et à caractériser les agents pathogènes qu’elles véhiculent.

Par ailleurs, une application smartphone sera développée, qui permettra aux personnes mordues par des tiques d’indiquer quand et où elles l’ont été. Elle existe déjà en Suisse, et devrait être adaptée à la France par l’Inra. Les données seront automatiquement analysées et permettront de générer en temps réel une cartographie des risques par les utilisateurs de l’application. Les tiques elles-mêmes pourront être envoyées pour examen à un laboratoire. L’application proposera également une surveillance des signes cliniques pour les personnes mordues, en collaboration avec les professionnels de la santé.

Toutefois, la prévention ne repose pas seulement sur des précautions individuelles. Ainsi, les animaux sauvages constituent les réservoirs majeurs des agents pathogènes transmis par les tiques et ils sont aussi la source de nourriture des tiques. Une gestion contrôlée de leur nombre est, de ce fait, directement en lien avec la densité de tiques dans l’environnement.

Autre piste, des actions pour réduire la contamination des animaux (soit par les tiques, soit par les agents pathogènes que celles-ci transmettent) sont à l’essai. À titre d’exemple, aux États-Unis, des chercheurs étudient la possibilité de vacciner les rongeurs contre l’agent responsable de la maladie de Lyme. Dans certains parcs américains, des systèmes pour nourrir les cervidés sont installés de telle sorte que les animaux doivent, pour se nourrir, passer leur tête dans une cavité recouverte d’une substance acaricide.

Des panneaux inexistants en forêt de Sénart

À titre collectif, la prévention doit impérativement s’accompagner de campagnes d’information. Celles-ci ne sont pas encore totalement efficaces en France, par comparaison avec d’autres pays. Aux États-Unis et dans de nombreux pays d’Europe, des panneaux avertissant du risque lié aux tiques et rappelant les gestes simples à réaliser après une promenade sont présents dans de nombreux lieux publics. En France, l’installation de tels panneaux est laissée au bon vouloir des municipalités et ce n’est pas là où ils seraient les plus utiles qu’on les trouve…

Par exemple, ils sont présents à l’entrée de tous les espaces verts à Paris, où le risque lié aux piqûres de tiques, même s’il existe, est relativement bas. Alors qu’on n’en trouve pas aux abords de la forêt de Sénart, au sud de l’île-de-France, qui est la forêt plus visitée de France et où les densités de tiques infectées sont élevées. Le plan ministériel contre les maladies à tiques qui sera présenté très prochainement devrait permettre d’améliorer la situation.

The Conversation

Muriel Vayssier-Taussat, Microbiologiste, INRA

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation. 20/09/16.

Rédaction RBLF

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