Voilà, tout est dit.
Comment voulez-vous après ça faire des campagnes massives contre le fléau des tiques omniprésentes, contre une zoonose envahissante, contre une borréliose de lyme alarmante, contre une pandémie galopante ?
Comment voulez-vous faire poids face à cette masse, cette manne ?

Lorsque le RBLF pose la question au Dr Horowitz aux JIDIMVT de Strasbourg en juin 2014: [1]
- Selon vous, qu’est-ce qui produit un tel blocage en France ?
Celui-ci répond directement :
- Le tourisme !
Une évidence vue de l’extérieur... Et les activités lucratives du tourisme n’admettent pas la présence de tiques et leur danger potentiel. La démonstration nous en est fournie en plein été, le 1er août, sur une radio nationale, France Inter. Lors d’une émission de grande écoute, "le Téléphone sonne" sur les problèmes des moustiques, frelons et tiques, un entomologiste de l’OPIE, François Lasserre vient tranquilliser le vulgum pecus.[2] Ces bêtes viendraient-elles pourrir nos vacances ?

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’’N’y faites pas - absolument pas - attention. N’y prêtez aucune attention. Soyez Zen et vous passerez un super été."[3]

Ainsi: Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Cette philosophie de Candide prédomine en France.
En reprenant les derniers chiffres dont se rengorge à raison le ministère, on ne peut que constater l’ampleur du phénomène:
Le 4 Pages, DGSI n° 36, juillet 2014 La France maintient sa position de première destination touristique au monde, loin devant les États-Unis (69,8 millions d’arrivées de touristes) et l’Espagne (60,7 millions).[4]

  • 7,33 % du PIB en 2012 en consommation touristique;
  • 1 245 742 emplois au 31/12/12;
  • 273 494 entreprises en 2011;
  • 11,3 milliards d’euros en 2012 en solde de la balance touristique.

La source ministérielle complète l’information:
En matière d’investissement, ce sont 12.738 milliards d’euros d’investissements dans le secteur du Tourisme en 2012 c’est à dire un montant quasi équivalent aux investissements consentis dans l’Agriculture ou l’Énergie et 3,5 fois supérieur à ceux de l’Automobile.
Et le ministère d’ajouter :
En matière de recettes tirées du tourisme international, la France occupe la troisième position, derrière les États-Unis et l’Espagne. Les recettes sont passées de 41,8 Mds € en 2012 à 42,7 Mds € en 2013, soit une hausse d’environ 2,2.


Extrait du film de Ch. Perrin "Quand les tiques attaquent"C’est après avoir discuté avec le Dr Horowitz et lu ces chiffres, qu’on réalise combien la France est une référence pittoresque, et pas seulement pour les américains, ce que corrobore la DGSI. En effet l’Hexagone offre dans un territoire restreint un patrimoine culturel incomparable et d’une infinie variété: géologique, préhistorique, historique, artistique, scientifique, architectural, naturel, littéraire, gastronomique, etc. En un petit espace, carrefour de multiples migrations estivales en Europe, et en un minimum de temps, le voyageur a tout à portée de main. Les Tour Operator chinois le savent aussi qui vendent pour 5 jours les circuits vers notre "Culture", symbole de l’Occident et de ses valeurs sans doute.

Dans ce contexte de guerre commerciale et de la Pole Position à tenir, les chiffres officiels de prévalences de la maladie de Lyme, ridicules, sont en cohérence, forcément en cohérence. La réalité de l’infestation est masquée malgré les alertes nationale et mondiale et le discours dominant est celui d’une dépréciation à tous crins. C’est ainsi que l’on entend François Lasserre, défenseur de la nature et de sa saine biodiversité, relativiser l’incidence de la maladie et sa gravité.

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Il évoque "une centaine de cas", total "minime" dit-il, par rapport à la grippe, aux noyades et accidents divers...(sic) La réalité de la pathologie est écartée par ces comparaisons inappropriées, à prendre pour se détendre, et être Zen ! (sic).

Dans la même émission de France Inter, le Professeur Willy Rozenbaum, du haut de sa haute compétence d’infectiologue, va dans le même sens que l’entomologiste. Éminent spécialiste des maladies infectieuses et tropicales[5], il peut se montrer rassurant pour les touristes.

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Mais son assimilation étrange (tique présentée à la fois comme germe, microbe, virus, bactérie...), son renversement de la non-fiabilité des diagnostics en accusations de "malhonnêtetés" et faux positifs fabriqués..., sa vision de la maladie (séquelles immunitaires et "patraquerie" (sic) !) ne leurrent pas une population de plus en plus au courant et qui ne veut plus s’en laisser compter par un discours officiel et honteux.[6]
Comme le démontre malheureusement l’émission du "Téléphone Sonne", le gisement touristique est plus important que toute mine d’or, et il va dans le sens des tenants du déni de la borréliose. Dans le film de Chantal Perrin, l’un des responsables du RBLF résume cet état des lieux:

Il n’y a pas, au moins, l’information pour alerter un minimum. Il n’y a pas.
De la même façon que dans les pharmacies dans les aires de loisirs, de nature, on ne trouve rien qui concerne à la fois des possibles infestations avec des panneaux par exemple ou les dangers que cela représente. Parce que ça gêne les hôteliers, les restaurateurs, tous ceux qui on des activités en montagne.
C’est quand même très difficile pour un maire devant sa commune d’afficher son petit panneau en disant : Attention ici il y a des tiques ! Il va dire: "Mais le boulanger, il ne viendra jamais s’installer... parce que sinon on n’aura pas de touristes’’.
C’est vraiment un sacré problème parce que si on ne veut pas dire et si on subit, jusqu’où va-t-on aller ?

Jusqu’où va-t-on aller pour conserver cette manne financière ? Plutôt que faire le siège du ministère de la Santé, les malades et leurs associations ne devraient-ils pas s’installer devant le ministère de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme ? C’est à lui qu’il faudrait poser ces questions:Extrait du film de Ch. Perrin "Quand les tiques attaquent"

  • Pourquoi n’y-a-t-il pas d’information dans toutes les pharmacies ?
  • Pourquoi n’y a-t-il pas une prévention d’état ?
  • Pourquoi n’y a-t-il pas des documentations dans tous les cabinets médicaux ?
  • Pourquoi n’y a-t-il pas une formation systématique de tous les médecins ?

Puisqu’on sait que des tiques il y en a partout.
Mais justement, les tiques, on ne veut pas qu’il y en ait partout. Armé de nos chiffres phares de la compétitivité touristique, des 84,7 millions de touristes étrangers en 2013 et de leurs 41,8 milliards d’euros dépensés, on parcourra le territoire en comprenant mieux l’absence de signalétique. Comme le dit Chantal Perrin dans son documentaire Quand les tiques attaquent!: Dans les forêts françaises contrairement à beaucoup de pays dans le monde on ne trouve aucune information sur les tiques... La charte du promeneur, les comportements interdits, les risques d’incendie sont écrits noir sur blanc, mais rien n’est dit sur le petit acarien porteur de bactéries.[7]

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Si cela arrive, nous indiquent les invités du "Téléphone sonne", il suffira de se chercher les tiques comme s’épouillent les singes, pour passer le temps,[8] et prendre un traitement préventif... [9]
Braves gens, dormez tranquille ! "Détendez-vous", répète F. Lasserre; ce ne sont que "patraqueries" comme dit W. Rosenbaum.
La première destination touristique au monde continue à être, silencieusement, une magnifique villégiature tranquille pour les tiques.

Notes

[1] Pour rappel les JIDMVT. Lire la présentation du livre du Dr Horowitz.

[2] France Inter, "Le Téléphone sonne", vendredi 1er août 2014, "Moustique tigre, frelon asiatique, tique : faut-il avoir peur de ces petites bêtes qui montent ? " Ré-écoutez dans son intégralité l’émission. Voir la notice sur François Lasserre. Vice-président de l’Office pour les insectes et leur environnement (Opie), co-président du Graine IdF (réseau d’éducation à l’environnement), expert « éducation » de l’UICN France et membre des Journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie (JNE).

[3] F. Lasserre, émission citée dont nous avons extrait des passages édifiants ponctuant cet article.

[4] Source : "Veille toursitique", portail de la mission d’information et de veille de la Sous-direction du Tourisme. Edité par la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS).

[5] Willy Rozenbaum, Spécialiste des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Saint Louis à Paris. Professeur à l’Université Pierre et Marie Curie, Paris VI.

[6] Willy Rosenbaum, émission citée. Extrait : "Las, la recherche de ces anticorps manque de spécificité. Il y a beaucoup de faux négatifs, beaucoup de faux positifs, encore plus de faux positifs que de faux négatifs. Je dois dire qu’il y a même eu - je ne sais pas s’il faut dire des scandales - mais en tous cas des malhonnêtetés qui ont été faites. C’est à dire certains laboratoires ont joué sur la crainte ou la peur des gens et ont inventé des résultats positifs.’’ Et encore un extrait: "./. dans ce qu’on appelle des formes chroniques de la maladie de Lyme, la majorité ne sont pas de vraies maladie de Lyme, c’est des patraqueries qui peuvent être très pénibles mais qui ne sont pas réellement dues à la bactérie, - à cause de ces résultats diagnostics qui sont un peu difficiles à interpréter."

[7] Lire notre présentation de son film.

[8] F. Lasserre, émission citée. Extrait :’’Même si la tête est dedans de toute manière vous pouvez rien y faire donc voila vous l’avez enlevée c’est pas grave... (W. Rosenbaum : "elle va partir.") vous regarder tous les endroits un peu sensibles un peu chauds, là ou ia des poil etc; c’est un peu intime comme détection les autres singes d’ailleurs s’épouillent ça permet d’avoir des conversations originales (38:38) voilà donc faites-le tranquillement Mais détendez-vous ! passez des vacances tranquilles; allez vous balader dans la nature. Plus vous serez en contact avec les bestioles plus vous serez à l’aise et plus elle vous seront familières.

[9] W. Rosenbaum, émission citée. Extrait :Si on est dans une région où la maladie de Lyme est reconnue comme étant assez prévalente, assez fréquente, on peut même prendre un traitement préventif. Certains médecins le proposent.