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Monday, December 15 2014

Lyme dans "Le Monde" : impressionnant!

Double page choc dans le journal Le Monde, édition du 10 décembre, consacrée à "La maladie de Lyme - Un fléau sous-estimé" et à la tique ,"ennemie chronique".

Le Monde Supplément 101214 TIQUE ENNEMIE CHRONIQUE

Aucun lecteur ne peut échapper à la spectaculaire photographie en tête de ce supplément Science&Médecine, celle d’une tique démesurément grossie, avatar de monstre de cauchemar prête à s’échapper de la page. Effet géant assuré ! Les autres images n’étant pas moins stupéfiantes.

Avec ses près de 300 000 ventes, le quotidien du soir donne un écho retentissant à la maladie. De plus en plus de médias s’emparent du sujet; la question est de plus en plus souvent affichée et le silence brisé. Depuis 3 ans tout à changé; il y aura un avant et un après.

Si la mise en page frise la recherche du sensationnel, l’article, lui, tout en étant court, n’est pas superficiel. Il faut saluer la manière dont Raphaëlle Maruchitch traite le problème dans ce double page, faisant clairement le point sur la prise de conscience de l’épidémie en marche.$$Le Monde Supplément Science&Medecine, 10 décembre 2014; cf. la page Science de l’article en ligne.

L’article bien documenté s’intéresse d’abord à l’incidence de la maladie, puis au dernier rapport officiel en date[1], et au travail de parlementaires français cet été[2], pour déboucher sur la problématique douloureuse à laquelle se heurte la majorité des malades: le diagnostic et les traitements, deux aspects fondamentaux qui mettent en cause la pertinence des conclusions du Consensus de 2006, appliquées comme un dogme.

Le Monde Supplément 101214 "LYME Un fléau sous-estimé"Donnant la parole à des médecins spécialistes, en premier lieu au Pr Pérronne, à des biologistes, à la directrice de la recherche à l’INRA, Mme Vayssier-Taussat , à des militants associatifs bien connus, la journaliste évoque les différents tests en usage pour détecter la maladie (Elisa, Western-Blot, PCR) et leur degré de fiabilité que le Pr Jaulhac responsable du CNR à Srasbourg vient de reconnaître comme "variable" alors que le chef de produits chez Siemens Healthcare Diagnostic - qui met au point les fameux Elisa décriés -, avance plutôt la nécessité d’une "détection clinique de la maladie", indiquant que "la biologie n’est là que comme une aide".
Raphaëlle Maruchitch signale "les traitements intermittents", les pistes possibles des médecines douces et de la phytothérapie à laquelle recourt aussi le Docteur Richard Horowitz, auteur de Soigner Lyme et les maladies chroniques inexpliquées paru en français cette année.[3] De ce livre qu’elle qualifie de "bible" sur le sujet, Daniel Christmann, professeur de pahologies infectieuses et tropicales au CHU de Strasbourg (qui s’accroche à sa thèse d’un symptôme résiduel de la maladie pour les malades en grande souffrance) a dû s’inspirer pourtant puisque désormais note t-elle il parle également de co-infections.
Elle souligne que les progrès dans la prise de conscience générale sont le résultat des actions des associations et des malades qui dénoncent un déni de la maladie et l’errance diagnostique.
Elle conclut sur l’immense terrain scientifique et médical qu’il reste à défricher.

Ce point journalistique bien documenté, honnête et clair, est très instructif sur le rôle primordial des malades et de leurs associations. Ce sont elles et eux qui sont aux premières places pour faire bouger les lignes: faire parler dans les médias pour gagner l’opinion publique, pousser le corps médical à s’informer et agir, obliger les Pouvoirs Publics à prendre leurs responsabilités dans tous les domaines dont celui évident et pourtant totalement négligé de la prévention. Le Monde rend éclatant le problème du déni.
Le Père Noël y mettra-t-il aussi du sien en apportant bientôt dans sa hotte un instrument médical performant opposable à tous ceux qui s’obstinent à considérer le Consensus de 2006 comme une panacée ?
De nouvelles avancées scientifiques, médicales et législatives - grâce à l’action, même modeste, de chaque malade et/ou aidant, de chaque personne informée, avec les associations unies dans la défense des malades et de leurs droits - est une exigence que tous les médias devraient soutenir.

Notes

[1] Rapport Zylbermann du 4 décembre à l’initiative de la Direction Générale de la Santé, sous la responsabilité du HCSP, Borréliose de Lyme. État des connaissances.

[2] résolution à l’attention de la Commission de Bruxelles, proposition de loi en octobre

[3] Lire notre article : "Le livre guide passionnant du Dr Horowitz"

Thursday, October 20 2011

Pas net Orphanet (portail des maladies rares)

TocTiqLoupe.jpgPas net, c’est le moins qu’on puisse dire; en effet "le portail des maladies rares et des médicaments orphelins" ne délivre pas une information bien nette quant à la borréliose.
Créé en 1997 par le Ministère de la Santé et l’INSERM, Orphanet est financé pour partie par ceux-ci, pour partie par la Commission Européenne et divers autres contributeurs associatifs ou privés, en fonction des secteurs (Les entreprises du médicaments, la fondation Groupama pour la santé, LFB Biomédicamanets etc.). On consultera les détails (peu) sur les derniers rapports d’activité en ligne, en notant que la page sur les partenariats est introuvable...

L’information sur la Borréliose que l’on trouvera sur leur site, dite "Résumé", semble en effet un parfait résumé des erreurs et omissions type rencontrées un peu partout et véhiculées par des membres mêmes du corps médical.
Il faut espérer que les internautes d’Orphanet vont avoir le réflexe (et l’idée) de télécharger, en bas de la page, le document annexe en format pdf et qu’ils ne se limiteront pas à ces premières informations tout à fait partielles (et partiales ?).
Mais l’annexe elle-même est sujette à caution. Ce document un peu plus complet corrigera certaines des assertions du "Résumé" tout en diffusant étrangement à son tour... d’autres approximations et fausses vérités.
Intitulé "Pub" par les services de l’Orphanet, le document annexe est réalisé avec la collaboration du Pr. D. Christmann, du S/ce des maladies infectieuses et tropicales du CHU de Strasbourg. A leur décharge (la page datant de 2008) on peut penser que leur documentation, bien qu’officielle, n’est plus à jour et que la maladie, sinon les malades laissés pour compte, les a déjà rattrapés.

Alors quel est le but d’en laisser paraître le moins possible ? Pourquoi faut-il contraindre le visiteur à chercher par lui-même dans une seconde étape ? Pourquoi une page complète n’est-elle pas accessible d’emblée ? Souci de clarté sur le site ? S’il faut être succinct doit-on être flou ?
Et comment cela se fait-il que l’annexe même n’est pas exempte de ces fautes, mensonges ou omissions... ?

Point par point on peut reprendre le texte tel que les visiteurs en quête d’informations fiables le lisent. En l’examinant à la loupe on s’étonne de plusieurs choses.

Explication de texte :

  • 1) La maladie de Lyme (du nom du lieu où la maladie a été identifiée aux USA) est une infection bactérienne due à Borrelia burgdorferi.

(1) Pas tout à fait juste; en effet d’une part la pathologie était déjà repérée en Europe à la fin du XIXe siècle; d’autre part, outre Borrelia burgdorferi, ce sont plusieurs souches de Borrelia qui sévissent en France (et en Europe) et qui ont chacune leurs particularités. Il faudrait presque parler de "borrélioses" au pluriel. Cela sera d’ailleurs rectifié dans le document annexe. C’est là un des grands problèmes rencontrés pour les traitements en Europe difficilement calquables sur ceux d’outre atlantique.

  • 2) L’incidence de la maladie de Lyme est variable en Europe et est de l’ordre de 5 à 350/100 000.

(2) Faux. Chiffres anciens et basés sur des données ponctuelles et limitées dans l’espace (cf. article zoonose). Le document annexe rectifiera plus ou moins; mais les chiffres sont toujours aussi caducs et partiels. Il n’y a aucun actualisation en France malgré les demandes européennes.

  • 3) Les manifestations cliniques se déroulent en trois stades.

(3) Faux. Certains développent tout de suite un stade "avancé". L’annexe le suggérera sans le dire vraiment.

  • 4) morsure de tique infectante généralement notée par le patient

(4) Une forte proportion de malades n’a jamais remarqué de morsure ou d’érythème. L’adverbe "généralement" ne s’appuie sur aucune donnée fiable, faute d’études (à ce sujet, nous renvoyons au hors série de l’INVS sur la borréliose, ainsi qu’à un précédent article de RBLF).
Ce fait soulève un des grands problèmes de la maladie : pas vu pas pris ! Sans morsure, le malade atteint n’est pas considéré comme atteint.

  • 5) Le stade secondaire est marqué par une possible dissémination au système nerveux

(5) Que veut dire "possible" ? Dans le cas où il y aurait pas cette dissémination , comment se définit alors la phase 2 ?

  • 6) (paralysie faciale, encéphalite...),

(6) L’encéphalite est une autre maladie provoquée par le même vecteur mais pas la même bactérie. L’amalgame est peu scientifique.

  • 7) le stade tertiaire, chronique

La chronicité n’a pas de rapport avec le stade.

  • 8) L’homme est l’hôte accidentel

(8) "accidentel" alors qu’il s’agit d’une zoonose dont l’INVS ne cache ni l’ampleur, ni la progression, ni les risques ?

  • 9) les animaux réservoirs (rongeurs, oiseaux, lézards)

(9) La restriction à ces seules animaux est erronée. Le gibier, les cervidés, les chevaux sont des porteurs. L’annexe néanmoins corrigera ce raccourci.

  • 10) transmise par les tiques (Ixodes)

10) On sait aujourd’hui que les tiques ne sont pas seules fautives. Taons et insectes divers sont pressentis.(cf. sur le site du Dr Hopf-Seidel sa brochure de juillet 2011. )

  • 11) Le diagnostic repose sur la clinique au stade primaire, ou la mise en évidence de Borrelia burgdorferi par culture, par PCR (Polymerase-chain reaction ou Amplification en chaîne par polymérase), ou encore par l’ascension du taux des anticorps après la phase primaire.

(11) Tout diagnostic devrait s’appuyer sur la clinique, surtout en cas de chronicité. Ce n’est pas tant l’infection visible et immédiate qui pose problème. Il faut encore attendre de tous les médecins qu’ils soient d’une vigilance extrême, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui en 2011.
D’autre part, aucun test ou examen n’a jamais été développé en Europe pour s’assurer de la présence de la maladie et pouvoir à tous les stades, la traiter. Trop compliqué et assurément trop d’argent à investir pour apparemment trop peu de cas... Telle qu’elle est encadrée aujourd’hui, c’est-à-dire avec un cadre importé des USA et avec des recommandations définitives, cette maladie ne rapporterait rien. Qu’en sera-t-il quand les milliers de cas seront dévoilés ?

  • 12) Le traitement antibiotique (amoxycilline, cycline) est d’autant plus actif qu’il est donné précocement.

(12) Le traitement en tout début d’infection peut agir. Encore faut-il que l’infection soit connue à temps... Pour autant guérit-il ?
On ne peut pas en dire autant de la maladie à son stade chronique car ce qui se fait ne peut pas être appelé traitement, mais bricolage ou expérimentation sur cobayes involontaires. Orphanet fait l’impasse sur cette réalité cruelle qui est exprimée noir sur blanc chez nos voisins, notamment dans leurs flyers de prévention.

  • 13) La prévention repose sur la lutte contre les tiques

(13) Et que fera-t-on des autres vecteurs (insectes piqueurs par exemple) ? Et puis quoi, lutter contre les tiques au DDT ? Leur envahissement ne le permet déjà plus.

  • 14) et la protection individuelle

(14) S’en remettre à la protection "individuelle" est une façon peu glorieuse de refuser la bataille. A ce stade c’est aux pouvoirs publics de s’investir dans une protection collective, au minimum par la prévention, l’information, les panneaux devant les sentiers plus exposés, une information générale en pharmacie et dans tous les lieux de santé par exemple, une formation des médecins etc. Un réel travail jamais entamé.

  • 15) lors de séjours en zone particulièrement à risque.

(15) Il n’y a plus de zones particulières à risque. Tout le territoire est maintenant à risque. En consultant les comptes-rendus du REID sur le site de l’INRA, on s’aperçoit que même les zones côtières ne sont plus indemnes.

  • 16) Toutes les informations de ce site ne dispensent pas d’une consultation auprès d’un médecin spécialiste, seul autorisé à donner un avis médical.

(16) L’Orphanet nous réservait pour la fin le meilleur ! Auprès de quels spécialistes les pauvres malades, non détectés, pourraient-ils se rendre alors même que leur médecin traitant les soignent pour tout autre chose ou leur délivre la plupart du temps des tranquillisants ? Une grand majorité de ceux-ci ne savent même pas ce qu’est cette maladie !
Et quel serait donc ce malade qui irait consulter de son propre chef un spécialiste de borréliose sans savoir qu’il en a les atteintes ?
Et que penser justement de ces "spécialistes", hospitaliers de centre d’infectiologie ou autres, qui, lorsqu’ils la reconnaissent (ce qui n’est pas acquis !), ne reconnaissent que l’infection naissante ou les cas de borréliose dite "typique", extrêmement rares en France ? La quasi totalité des médecins de CHU ne connaît pas la maladie dans sa phase chronique, ou du moins... n’en laisse rien paraître.
Quant aux experts, il n’est pas rare qu’ils envoient sans sourciller les malades en psychiatrie...

Bilan de ce petit tour de site et de "Pub." : le visiteur informé reste perplexe et mécontent.
Que devrait-on attendre d’un tel portail sur les maladies rares, en l’occurrence sur la borréliose ? Doit-il donner des clefs de compréhension ou rester dans le vague et l’indéterminé ? Ne devrait-il pas clairement mentionner qu’il s’appuie sur des données non actualisées voire même anciennes voire même fausses, de toutes façons ponctuelles et caduques ?
Doit-il dire la vérité sur l’absence de prévention, de repérage de la maladie, de traitements de la chronicité ou continuer à cacher ces graves problèmes ?
On aimerait entendre systématiquement "on ne sait pas" dans la bouche des médecins et "informateurs" tels Orphanet plutôt que de les voir détourner l’attention, masquer la réalité, faire l’autruche et conduire au mur.
En tous cas ce portail-là n’ouvre pas à la connaissance et devrait revoir sa copie avant que les tiques ne l’attaquent.